« Pour moi, le kantisme est un mode de vie avant d’être une doctrine. Un ensemble de gestes et de postures plus qu’une collection de textes et un système de concepts. Penser, c’est mener une vie de penseur. Un mot exprime cette définition : "l’ascèse" qui, au sens antique, ne signifie pas mortification mais entraînement, exercices et règles de vie.
Vivre sans femme est une ascèse. Vivre avec aussi.
Parmi les règles de vie, il y a la question de la mixité. Peut on admettre des femmes dans une école philosophique. Qu’en faire ? Des amies, des amantes, des épouses ? Kant évite ces destinées avec élégance. Pas d’épouse, pas de beaux-parents, pas de maîtresse, pas d’enfants légitimes ou illégitimes. Il évite Toinette, Thérèse, Caroline, Régine et les autres. Il évite le terrible inconfort du jeune marie Hegel oblige de bâcler la science de la logique pour entretenir son ménage. Il évite d’avoir à gager sa bibliothèque comme Diderot dut le faire pour doter sa fille Angélique. Je préfère ne pas parler de la progéniture de Karl Marx qui empêcha ce grand penseur d’avoir l’esprit dégagé des soucis matériels. »